Comment transformer des ondes en euros
Les opérateurs de téléphonie mobile devraient prochainement se partager jusqu’à 80 MHz de spectre supplémentaire dans la bande des 3,5 GHz. L’Arcep prépare aussi le terrain à des ouvertures sur les 3,8 à 4,2 GHz pour des usages industriels. Une consultation est lancée avant de passer à la suite.
Dans son introduction, l’Arcep explique que « plusieurs bandes harmonisées pour le déploiement de réseaux mobiles sont ou devraient être rendues disponibles pour de nouvelles attributions de fréquences dans les deux années à venir ». Il s’agit des bandes 3,410 à 3,490 GHz, 3,8 à 4,2 GHz, 1,427 à 1,517 GHz (alias la bande 1,4 GHz) et 24,25 à 27,5 GHz (alias la bande 26 GHz). La consultation publique du jour porte uniquement sur les deux premiers lots.
3,4 à 3,8 GHz : des bandes harmonisées au niveau européen
Les bandes 3,410 à 3,490 GHz (soit 80 MHz) sont attribuées au niveau départemental, mais les autorisations en métropole arriveront à échéances à partir du 25 juillet 2026. L’Arcep se prépare donc à la suite des événements. Cette bande est intéressante pour les opérateurs, car elle « fait partie de la bande 3,4 – 3,8 GHz, harmonisée en Europe pour un usage mobile ».
Elles sont pour le moment exploitées par des réseaux THD radio d’initiative publique et des réseaux de boucle locale radio (BLR). Ces technologies permettent de proposer un « service fixe » d’accès à Internet, mais elles vont laisser le champ libre à d’autres usages, notamment la téléphonie mobile en 5G.
La 5G, pour rappel, a été lancée avec une bande « cœur » dans les 3,5 GHz. Elle permet plus de débit (car les opérateurs ont plusieurs dizaines de MHz chacun), mais porte moins loin que les fréquences plus basses.
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3,8 à 4,2 : déjà des expérimentations depuis des années
Selon la Commission européenne, la bande 3,8 à 4,2 GHz permettra de répondre aux besoins en fréquences « intermédiaires ». Comme la bande des 3,5 GHz déjà déployée en France, elle permet d’avoir plusieurs centaines de MHz et donc de proposer une bande passante importante pour des usages ciblés.
L‘Arcep rappelle qu’elle a ouvert en mars 2022 un guichet d’expérimentation dans cette bande (plus précisément sur les 3,8 à 4,0 GHz) pour des usages industriels. Il a été prolongé à deux reprises, pour un total de 132 demandes, « conduisant pour l’instant à l’attribution de 116 autorisations ».
L’Arcep compte ouvrir les deux bandes, avec deux méthodes différentes
Avec sa consultation, l’Arcep espère obtenir des éclaircissements « dans la perspective de futures attributions de ressources spectrales en bandes 3410 – 3490 MHz et 3,8 – 4,2 GHz en Métropole, dans un contexte où il existe des demandes pour des attributions locales permettant le déploiement de réseaux mobiles pour des usages professionnels ».
En l’état, l’Arcep envisage deux pistes. Premier point : « proposer au Gouvernement des conditions d‘attribution de la bande 3410 – 3490 MHz pour des réseaux ouvert au public, pour permettre aux opérateurs mobiles de compléter leur portefeuille de fréquences dans la bande 3,4 – 3,8 GHz en France métropolitaine ». Deuxièmement, une attribution locale de la bande 3,8 – 4,2 GHz « pour le déploiement de réseaux mobiles locaux répondant à des usages professionnels ».
La consultation sert à recenser les besoins des opérateurs mobiles dans la bande 3,4 GHz et recueillir les observations des acteurs sur l’ensemble des bandes dont il est question aujourd’hui.
Réaménager la bande de 3,4 à 3,8 GHz ? Possible… mais non
Dans son document, le régulateur soulève la question de réaménager la bande 3,4 à 3,8 GHz, mais referme cette possibilité : « l’Arcep n’envisage pas, a priori, d’imposer un réaménagement ». Elle explique sa décision par « des difficultés opérationnelles, et, d’autre part, des coûts de migration potentiellement conséquents ». La question semble posée pour le principe.
« Les équipements déjà déployés aujourd’hui dans la bande 3,4 – 3,8 GHz sont-ils en mesure d’exploiter, en tout ou partie, les fréquences de la bande 3410-3490 MHz ? », demande l’Arcep aux acteurs du marché.
Après avoir fermé la porte à un réaménagement, elle revient donc par la fenêtre en demandant si les équipements actuellement sur le marché permettent « l’utilisation de blocs de fréquences non contigus dans cette bande ».
80 MHz vont être libérés sur les 3,4 GHz, de quoi augmenter le spectre des quatre opérateurs nationaux qui se partagent actuellement entre 70 MHz et 90 MHz (voir tableau ci-dessus).
De nouvelles obligations de couverture ?
Le régulateur voudrait également savoir si les acteurs du marché ont identifié « des zones qui nécessiteraient une amélioration de la connectivité/couverture mobile ». Les licences des fréquences sont généralement assorties d’obligations de couvertures.
Avec les 3,5 GHz pour la 5G, l’Arcep proposait aux opérateurs d’acheter à un prix fixe 40 MHz de fréquences, en échange d’engagements irrévocables. Les quatre ont accepté.
De la 5G pour l’industrie « au fil des demandes » ?
Sur la bande 3,8 à 4,2 GHz, l’Autorité rappelle qu’elle est aujourd’hui utilisée par les stations terriennes du
service fixe par satellite (FSS) et qu’elle « a vocation à le rester ». Mais, ces stations sont « déployées sur un nombre limité de localisations sur le territoire national ». Cela laisse de la place à d’autres usages, notamment la 5G « industrielle ».
L’Arcep demande donc au marché s’il a « des observations sur le principe d’attribuer les fréquences de la
bande 3,8 – 4,2 GHz pour des réseaux mobiles couvrant des usages professionnels ». Vient aussi la question sur une attribution locale « au fil des demandes ».
Et maintenant ?
L’Arcep dispose déjà d’une petite idée sur son plan de déploiement des fréquences, mais demande aux acteurs d’envoyer leurs retours pour détecter un éventuel éléphant dans la pièce. L’Autorité peut en tenir compte, ou pas.
*La consultation est ouverture jusqu’au 4 novembre 2024.