The best things in life are free, but you can give them to the birds and bees

Le président américain a renouvelé dimanche son soutien ouvert au monde des cryptomonnaies, en listant les cinq actifs numériques qui pourraient constituer la future « réserve fédérale » américaine. Sa promesse de faire des États-Unis la future « capitale crypto » du monde a immédiatement fait bondir le cours des cryptomonnaies concernées… et déclenché des critiques virulentes, y compris dans son propre camp.
Effacée l’euphorie qui a suivi l’investiture de Donald Trump, avec un cours record de 109 000 dollars pour le bitcoin : fin février, la vedette des cryptomonnaies traverse un creux, allant jusqu’à repasser brièvement sous la barre des 80 000 dollars vendredi. La situation s’est subitement inversée dimanche, quand le président américain a réaffirmé son idée de constituer une réserve stratégique de cryptomonnaies.
Un Fort Knox de crypto aux contours encore flous
Rappelant son décret visant à créer des conditions favorables à l’essor des cryptomonnaies aux États-Unis, signé trois jours après son investiture, le 23 janvier dernier, Donald Trump a nommément cité trois cryptomonnaies susceptibles, selon lui, de constituer la future réserve stratégique crypto fédérale.
« Une réserve de cryptomonnaies états-unienne aidera ce secteur crucial à se relever après des années d’attaques corrompues de la part de l’administration Biden. C’est pourquoi mon décret (…) demande au groupe de travail présidentiel d’avancer sur une réserve stratégique de crypto comprenant XRP, SOL et ADA. Je veillerai à ce que les États-Unis soient la capitale mondiale de la crypto », a publié dimanche Donald Trump sur son réseau social, Truth.
Le message a fait l’effet d’une bombe sur le cours des trois cryptoactifs concernés, avec des gains de plus de 20% en quelques minutes pour Ripple (XRP) ou Solana (SOL), et un sursaut de près de 80 % pour Cardano (ADA). Deux heures plus tard, Donald Trump a rassuré dans un second message ceux qui s’inquiétaient de ne pas voir figurer les deux premières capitalisations du marché que sont le bitcoin et l’ethereum : « Et, bien évidemment, le BTC et l’ETH, comme d’autres cryptomonnaies de valeur, seront le cœur de la réserve. J’aime aussi le bitcoin et l’ethereum ! »
En dépit de son effet immédiat sur les marchés, l’annonce reste encore très floue : ni Donald Trump, ni son équipe, n’ont précisé, à l’occasion de cette communication surprise, la nature exacte de cette réserve stratégique, sa politique de constitution, ou les montants qui pourraient lui être alloués.
Les seuls éléments d’information publics à date résident dans le décret présidentiel du 23 janvier dernier. On peut y lire que Donald Trump donne six mois à son groupe de travail pour « évaluer la création et le maintien potentiels d’un stock national d’actifs numériques et proposer des critères pour l’établissement d’un tel stock, potentiellement dérivé de crypto-monnaies saisies légalement par le gouvernement fédéral dans le cadre de ses efforts d’application de la loi ».
Le document souligne par ailleurs que Trump refuse catégoriquement l’idée d’un dollar numérique géré par la FED (la banque centrale américaine). Il lui préfère explicitement un « stablecoin », c’est-à-dire une cryptomonnaie dont la valeur n’est pas définie par l’offre et la demande, mais par l’adossement à un actif sous-jacent, en l’occurrence le dollar américain. Dans sa communication en ligne, le président ne mentionne toutefois pas un stablecoin (le plus connu étant USDC, pour USD Coin, émis par une société privée baptisée Circle), mais des cryptomonnaies particulièrement spéculatives. Le tout ayant vocation à être piloté directement par l’exécutif, sans passer par le truchement d’une banque centrale…
Une réserve construite sur des actifs volatils ?
L’idée réaffirmée dimanche par Trump a rapidement suscité son lot de critiques, voire de soupçons. « Si ce tweet est vrai, c’est une très mauvaise idée de dépenser l’argent du contribuable pour acheter des cryptomonnaies émises par des gens qui lui ont donné des millions de dollars », fait remarquer Jason Calacanis, investisseur et figure historique de la Silicon Valley.
Aux États-Unis, les entrepreneurs phares de la scène crypto figurent en effet au rang des soutiens financiers de Donald Trump, comme en témoigne le recensement effectué par Molly White, commentatrice aussi avisée que critique de la scène crypto.
Les critiques émanent aussi de personnalités proches du camp Trump. Ainsi Joe Lonsdale, cofondateur de Palantir et ami revendiqué d’Elon Musk, appelle-t-il lui aussi à se détourner de l’idée. « Pour être clair, je suis pro crypto (…) mais pour moi, ça n’englobe pas le fait que l’argent du gouvernement serve à en acheter. Ce n’est pas le rôle légitime et principiel du gouvernement ».
« Ce que Trump fait ici sent la corruption, surtout si l’on considère que TrumpCoin est basé sur Solana ($SOL). Un conflit d’intérêts tellement évident. Qui sait quelles autres affaires lui et sa famille ont avec $XRP et $ADA », interroge plus directement un internaute en réponse au message de Calacanis.
Deux jours avant son investiture, Donald Trump avait en effet lancé, sans crier gare, une monnaie à son effigie, le Trump Coin, adossé au jeton Solana. La manœuvre avait là aussi entrainé une hausse éclair du cours.
L’équipe rapprochée de Donald Trump semble d’ailleurs consciente que son implication directe dans certains marchés risque d’entraîner quelques défiances. L’entrepreneur et investisseur David Sacks, nommé en décembre dernier « tsar de l’IA et des cryptos » par Donald Trump, aurait ainsi pris soin de solder la plupart de ses positions en cryptomonnaies ou dans les startups de cet univers avant l’investiture, remarque lundi le Financial Times.