« Voilà qui fait mauvais genre », ironise le journaliste Marc Rees sur L’Informé : le moteur de recherche Qwant, qui avait fait de la protection de la vie privée de ses utilisateurs son fer de lance, vient de faire l’objet d’un « rappel à ses obligations légales de transparence et d’information » de la part de la CNIL.
La Commission avait été saisie par Stéphane Erard, un ex-développeur de Qwant en conflit avec son ex-employeur, qu’il accusait de chercher à masquer que le moteur, soi-disant « souverain », recourait en fait aux services du moteur Bing de Microsoft, comme nous l’avions rapporté dans notre enquête-fleuve de 2019.
Des contrôles effectués en juillet et septembre 2019 « ont permis d’établir que la société Qwant transmettrait à la société Microsoft Ireland Opérations Limited des données essentiellement techniques (…) afin que cette dernière renvoie les résultats correspondant aux recherches faites par les utilisateurs ainsi que des publicités contextuelles », relève la décision de la CNIL, consultée par L’Informé.


Y figuraient des identifiants et adresses IP tronquées. Or, à l’époque des contrôles, « Qwant indiquait que les données étaient anonymes » et « par corrélation », le moteur de recherche « ne mentionnait ni la finalité publicitaire de la transmission des données à la société Microsoft Ireland Opération Limited, ni la base légale mobilisée par ce traitement ».
La CNIL requalifie pour sa part ces informations de « pseudonymes », au regard des recommandations et de la jurisprudence en vigueur. Dès lors, les informations délivrées aux utilisateurs « n’étaient pas conformes au règlement général sur la protection des données à caractère personnel (RGPD) qui s’appliquait pleinement », relève L’Informé.
La CNIL constate cela dit que Qwant a corrigé sa politique de confidentialité pour la remettre d’aplomb avec ces normes de protection en 2020, « soit un an après les premiers contrôles par ses agents », souligne notre confrère.
Contacté par l’Informé, Qwant souligne que ce simple rappel à la loi date d’avant le rachat de l’entreprise par Synfonium (composé d’Octave Klaba fondateur OVH Cloud à 75% et de la Caisse des dépôts et consignation à hauteur de 25%) en 2023, et confirme « que Qwant ne stocke aucune donnée personnelle et est en conformité totale avec les engagements que nous annonçons ».
L’Informé rappelle par ailleurs que Stéphane Érard avait pour sa part fait l’objet d’un licenciement pour faute en 2017, pour avoir insinué sur Twitter que Qwant trompait ses utilisateurs sur sa politique de confidentialité. Un licenciement confirmé par le Conseil des Prud’hommes en 2018, puis par une cour d’appel en 2022.
En cette même année 2022, Éric Leandri, alors PDG de Qwant, avait de son côté été condamné par le tribunal judiciaire de Paris pour espionnage de la boite mail d’un autre associé de Qwant, Jean-Manuel Rozan. Les faits s’étaient déroulés fin 2019, alors que Leandri dirigeait la société au slogan : « le moteur de recherche qui ne sait rien sur vous et ça change tout ! ».