
Les entreprises françaises devront bien basculer à la facturation électronique à compter du 1ᵉʳ septembre 2026, mais elles ne pourront finalement pas compter sur la plateforme de dématérialisation gratuite initialement envisagée par l’État. Entre contraintes de délais et de budgets, Bercy vient en effet de revoir à la baisse les ambitions de son futur Portail Public de Facturation.
Développé par l’Agence pour l’informatique financière de l’État (AIFE) sous la houlette de la Direction générale des Finances publiques (DGFiP), le Portail Public de Facturation (PPF) doit devenir le pont entre l’administration fiscale et les échanges commerciaux inter-entreprises. Il représente à ce titre l’une des pierres angulaires de la bascule des entreprises vers la facturation électronique.
Ses ambitions viennent toutefois d’être revues à la baisse. Alors que le portail devait initialement intégrer un outil public et gratuit de facturation, il se contentera finalement de recenser la liste des plateformes tierces agréées.
« Le projet sera poursuivi en privilégiant la construction d’un annuaire des destinataires, indispensable aux échanges entre les plateformes, et d’un concentrateur des données permettant leur transmission à l’administration fiscale. Cette réorientation doit notamment permettre d’assurer la tenue du calendrier prévu par la loi de finances pour 2024 et le respect des moyens définis », indique ainsi Bercy dans un communiqué.
Le modèle en Y de la facture électronique
Les Finances publiques rappellent à cette occasion le calendrier associé à la facturation électronique. L’émission de factures électroniques deviendra une obligation à compter du 1ᵉʳ septembre 2026 pour toutes les entreprises de plus de 250 salariés. Elle s’étendra aux PME et aux microentreprises un an plus tard, le 1ᵉʳ septembre 2027.
Instaurée au nom de la compétitivité des entreprises, mais aussi et surtout de la lutte contre la fraude, notamment à la TVA, la facturation électronique ne se limite pas à supprimer le papier. Elle suppose que l’émission et la réception de factures se fassent par l’intermédiaire d’une plateforme centrale, le PPF, à laquelle se connectent l’émetteur de la facture, son destinataire, mais aussi l’administration, dans un modèle dit « en Y ».
Dans sa version initiale, le PPF devait donc intégrer une plateforme publique de dématérialisation, inspirée de Chorus Pro et offrant un service minimum garanti, et gratuit. C’est cette option qui disparait du projet, ne laissant plus la possibilité aux entreprises que de passer par des acteurs tiers privés. En l’occurrence, des plateformes de dématérialisation partenaires (PDP) immatriculées auprès des services de Bercy, dont les services sont payants, et qui devaient se distinguer de la brique publique gratuite en offrant des fonctionnalités additionnelles.
Environ 70 entreprises sont aujourd’hui « immatriculées sous réserve de leur raccordement ultérieur au portail public de facturation », d’après la liste disponible sur le site des impôts.
Coup dur pour les opérateurs de dématérialisation
« C’est un rôle central qui est confié aux plateformes de dématérialisation partenaires (PDP) puisque toutes les transactions inter-entreprises ou avec l’État pourront et devront être réalisées via ces dernières. Dans ce contexte, le portail public de facturation se recentrera sur les services indispensables aux entreprises et aux PDP, ainsi qu’à l’administration fiscale en vue notamment de sa mission de lutte contre la fraude à la TVA, soit les fonctions d’annuaire et de concentrateur de données », résume de son côté la DGFiP.
Le projet informatique porté par l’AIFE se voit ainsi réduit à la portion congrue. Il existe bien toujours un PPF, mais ce dernier se limitera à offrir à l’accès à un annuaire, et à recevoir les extractions de données de facturation et de transaction.
Si les plateformes de dématérialisation partenaires ont toutes les raisons de se réjouir de cette récente évolution, la décision de Bercy risque en revanche de susciter quelques déceptions chez tous les éditeurs, souvent plus petits ou plus spécialisés, qui, plutôt que de devenir une PDP ou d’en intégrer une en marque blanche, prévoyaient de se connecter à la brique publique.